i could really use a wish right now (lyssa)

Il faisait nuit noire dans la maison des Hartley. Toute la petite famille semblait endormie. Vraiment ? Et bien non, au coin d'une des fenêtres, on pouvait distinguer une petite lumière et deux petites filles rire le plus silencieusement possible. Lyssa parcourut de ses pieds nus le long couloir et entra sans même frapper dans la chambre de l’aînée. Izzy et Harlow se figèrent, et lorsque leurs regards se posèrent sur la troisième de la fratrie, elles semblèrent se détendre un petit peu. "Bah, tu dors pas ?", demanda Harlow. Lyssa ferma la porte derrière elle et s'avança en sautillant vers ses deux plus grandes sœurs, assises sur le coin du lit de Izzy. "J'reste ou je cris", lâcha-t-elle tout sourire. Les deux plus grandes soupirèrent un petit peu et Lyssa ne se fit pas prier pour les rejoindre sur le lit. "D'accord, mais tu fais pas de bruit", la prévint Izzy. Et ça suffisait à Lyssa. Elle voulait faire partie de ce duo de choc... Bailey et Jilly, les deux plus jeunes Hartley, étaient trop petites pour réellement plaire à Lyssa. Et elle était bien décidée à entrer dans le cercle très fermé composé de ses deux plus grandes sœurs. Qu'elles le veuillent, ou non.
La famille Hartley était connue pour sa fratrie composée de cinq filles. Izzy, Harlow, Lyssa, Bailey et enfin Jilly. Cinq filles aux voix d'anges qui émerveillaient leur monde au travers de la chorale de leur ville natale, en Caroline du Nord. Lyssa se souvenait encore de cette période, de cette innocence particulière à l'enfance. Elle se souvenait également de ces déménagements, dans le Montana, avant que les Hartley ne s'établissent à Redcliff, alors qu'elle entrait dans l'âge ingrat de l'adolescence. Une enfance des plus heureuses, une vie qui aurait pu être simple et puis, cette envie de dévorer la vie à pleines dents.

"A ton avis, il est blond ou brun ?". Lyssa posa son verre de vin et releva sur sa meilleure amie un regard étonné. "Qui ça ?". La conversation lui échappait et disons que les quelques verres qu'elles avaient déjà toutes deux ingurgité ne l'aidait pas vraiment. "Ton voisin !", répondit Leah. Ah, là c'était un petit peu plus clair... Enfin, juste assez pour qu'elle hausse les épaules, se laissant aller à imaginer le physique que pouvait avoir son mystérieux voisin. Voilà quelques années qu'elle vivait au troisième et dernier étage d'un petit immeuble du centre ville. Ils n'y avait que deux appartements sur le palier et jamais elle n'avait croisé celui qui vivait en face de chez elle. Pourtant, il était occupé, elle le savait. Quelques fois, elle entendait de la musique venant de son appartement. Mais jamais elle ne l'avait vraiment vu. Était-il jeune ou vieux ? Bond ou brun ? Peut-être même roux ? Ses yeux étaient de quelle couleur ? Portait-il des lunettes ? Tant de mystères qui ne faisaient qu'accentuer l'envie de découverte des deux jeunes femmes. Et de Sam. "A mon avis, il est super mignon... C'est un prénom de mec mignon ça Jamie !". Lyssa pouffa de rire alors que Sam s'installait à côté d'elle sur le canapé, bouteille à la main. Encore une fois, ils allaient finir complètement bourrés à s'endormir devant un épisode d'une vieille série rediffusée sur une chaîne du câble dont personne ne retient le nom. "Pff, n'importe quoi", ria Lyssa. Pourtant, au fond d'elle, la jeune femme était un peu d'accord avec Sam. Sam, le troisième du trio de choc, le seul représentant du sexe masculin, l'homosexuel revendiqué qui ne cessait de développer des théories foireuses, mais qui faisaient toujours rire les deux jeunes femmes. "Et avec un peu de chance, il est gay !". Les filles éclatèrent de rire et après avoir bu une bonne gorgée, Leah s'exprima. "T'étais pas avec un certain Mike toi, la dernière fois qu'on s'est vus ?". Sam leva exagérément les yeux vers le ciel, remettant une mèche de ses cheveux en place. "Mark... et non, c'est fini, il commençait à devenir pot de colle et puis, les types qui assument pas aimer les pénis auprès de leur famille et leurs amis, ça va cinq minutes !". Lyssa posa une main compatissante sur l'épaule de son ami. Pas facile d'être homosexuel au sein d'une ville rurale un peu reculée du monde. Sam était fort, il l'avait toujours été et se fichait bien de ce que l'on pouvait dire sur lui une fois son dos tourné... mais ce n'était pas le cas de tout le monde dans le coin. "De toute façon, il était moche", lâcha Leah, de cette brutalité qui lui était propre. Sam et Lyssa aimaient dire que Leah était un homme dans un corps de femme. Elle ne prenait pas quatre chemins pour dévoiler le fond de ses pensées et avait tendance à un peu intimider son monde... mais derrière ce masque de dureté se cachait un cœur en or et une amie loyale. Parfois, Lyssa se trouvait un peu insignifiante face à deux caractères aussi forts, mais elle avait ses particularités elle aussi. "Merde, ça vient d'une pallier ce bruit ?". Tous stoppèrent leurs mouvements et effectivement, il y avait bien des bruits de pas, montant le petit escalier en bois menant au dernier étage. Leur étage. D'un même mouvement, les trois amis bondirent et se précipitèrent dans l'entrée du petit appartement pour observer au travers du judas. Pas facile de voir quoique ce soit tant les uns et les autres se bousculaient, et ce fut Leah qui s'exprima la première. "Il est là, il est là !!!". Sans comprendre comment, Lyssa réussit à pousser ses deux amis pour observer un petit peu plus précisément ce qu'il se passait sur son pallier. De dos, un homme était face à la porte de l'autre appartement. Il ne semblait pas très grand, ses cheveux mouillés à cause de la pluie dehors. Il portait un sweet foncé et un jean brut. "Pousse-toi la grosse ! Oh... j'l'imaginais avoir un plus beau cul...", et Sam venait de prendre sa place. Lyssa manqua de se rétamer contre le meuble à sa droite, mais reprit tant bien que mal son équilibre. "Mais la grosse elle t'emmerde... T'as vu ta coupe de cheveux ? On dirait un lama !". Sam se tourna si brutalement vers elle, que Lyssa eut presque un mouvement de recul. Ses yeux la scrutaient en grand et elle en eut presque le souffle coupé. "On avait dit pas les cheveux Hartley ! Tu sais que mon coiffeur m'a loupé !". Et comment oublié ? La semaine précédente, Sam s'était pointé, bonnet sur la tête. Étrange pour un mois de septembre. Finalement, après moult interrogations, les filles avaient fini par savoir. Et le fou rire qui s'en était suivi restait gravé dans les annales. "Fermez-là, il va vous entendre !", tenta de calmer Leah... mais c'était trop tard et à peine deux secondes plus tard, deux coups se firent entendre contre la porte. Les trois amis se figèrent et sellèrent leurs bouches. Ils se regardèrent quelques instants avant que Leah ne chuchote : "Mais vas-y ouvre !". Lyssa sentit la panique l’envahir... Sans vraiment comprendre pourquoi. C'était stupide, juste son voisin sonnant à la porte... Elle allait voir son visage... La première fois en deux ans de voisinage...pas de quoi en faire toute une montagne... Alors pourquoi ces battements de cœur résonnant dans ses oreilles ? "M'en fou, j'ouvre moi !". Et une seconde plus tard, Sam avait ouvert la porte, les trois amis fixant l'homme face à eux. Effectivement, il n'était pas très grand, sans être petit. Il semblait plutôt jeune, un peu comme eux. Ses cheveux mouillés par la pluie tiraient vers le noir et il avait l'air plutôt sympathique. Le genre d'homme mignon, mais un peu quelconque. "Euh... salut...". Il avait une jolie voix. "Jamie ? C'est Jaimie ? Bonjour Jaimie !". Lyssa tourna la tête vers Sam, le dévisageant. Okay, son ami était en mode psychopathe. L'homme se mit à rire légèrement avant de hocher la tête. "Non, désolé.". Mais alors, c'était qui ce mec ? "J'suis un ami de Jamie... Et justement, j'ai un colis à lui remettre, mais il est pas chez lui...". Lyssa posa son regard sur la main droite du jeune homme. Effectivement, il tenait une petite boite en carton. "Mais il est jamais chez lui ce type, c'est pas possible !", ne put s'empêcher de lâcher Leah. Elle n'avait pas tord, mais le jeune inconnu sembla un peu surpris. Il se mit à rire et haussa légèrement les épaules. "Ça a un peu de valeur, du coup, j'ai pas vraiment envie de le laisser sur le paillasson... et Jamie le voulait rapidement... C'est possible que j'vous le laisse et que vous lui donniez ?". Lyssa ouvrit la bouche, un peu perdue, mais fut vite dépassée par Sam, poussant légèrement les filles pour se mettre en avant. "Mais bien sûr ! Au fait, moi c'est Sam...". Okay, il faisait son numéro de drague. Typique de Sam. Lorsqu'un mec lui plaisait, il prenait cette voix mielleuse et ce ton particulier. Même avec une coupe de cheveux pourrie il parvenait à garder confiance en lui. "Raf", se contenta de répondre le jeune homme, lui offrant un joli sourire. Lyssa attrapa le colis qu'il tendait et après quelques formulent de politesse ils fermèrent la porte. "Bah quoi ? Finalement de près, il a un beau cul !". Et tous les trois partirent dans un fou rire.

"Putain d'merde Bailey, range tes fringues !", hurla Lyssa, manquant de tomber par terre à cause des vêtements de sa petite sœur, en plein milieu du salon. "Ça va gueule pas d'bon matin !". Lyssa soupira et entra dans la petite cuisine, s'affalant sur une chaise. Elle manquait terriblement de sommeil. Sortir en boite avec Sam la veille au soir n'avait pas été l'idée du siècle, surtout lorsqu'elle bossait le lendemain. Heureusement, Harlow semblait avoir tout prévu puisque le café était déjà préparé et le bol préféré de Lyssa sous son nez. "J'vois que tu as fait quelques folies hier !". Harlow ria un petit peu... Chose qui arrivait trop rarement ces derniers temps. Mauvaise passe, avait-elle dit, mais Lyssa savait que ça allait plus loin que ça, au point d'en inquiéter Izzy qui n'arrêtait pas d'appeler pour parler du "cas Harlow". Mais Lyssa ne savait pas trop quoi faire. Elle ne s'y connaissait pas trop en histoires de couple, sa vie sentimentale était au point zéro, ce n'était pas elle qui allait donner des conseils conjugaux à sa grande sœur... Alors, elle l'avait hébergée... Ce qui avait eu comme conséquence d'attirer également les deux dernières Hartley. Pas facile de vivre à quatre dans un si petit appartement et si Lyssa râlait beaucoup, elle était quand même heureuse d'avoir ses sœurs auprès d'elle. Et puis, avec Harlow, c'était facile, plus simple qu'avec les deux plus jeunes. Comme réponse, Lyssa se contenta de grogner quelque chose d'assez incompréhensible et but une grosse gorgée de café. Jilly arriva alors dans la cuisine, tout sourire. "Bonjour !". Elle s'installa sur une chaise et entama son petit déjeuner. Lyssa posa une main sur son front, se demandant bien comment elle allait survivre à cette journée. Son regard se posa alors sur le plan de travail de la cuisine où était sensé se trouver le colis pour son voisin. Elle avait glissé un mot sous sa porte une semaine plus tôt, lui indiquant qu'elle détenait son colis. Elle lui avait filé son numéro de téléphone, mais elle n'avait toujours pas de nouvelles... L'envie d'ouvrir ce colis la démangeait, mais elle s'était retenue... Sauf que là... il n'y avait aucune trace de colis. Ça l'éveilla d'un coup. Lyssa se redressa et fronça les sourcils. "Il est où l'colis ?", demanda-t-elle, un peu paniquée. Jilly croqua dans sa biscotte et après s'être essuyée le coin de la bouche, s'exprima. "Ah ouais, j'ai oublié de te dire, le voisin est passé la semaine dernière pour récupérer son colis". Lyssa ouvrit de grands yeux. Les bras de Morphée étaient bien loin désormais et elle peina à trouver ses mots. "QUOI ?!". Bon, la partie raisonnable de son cerveau lui dicta que ce n'était pas bien grave... Mais l'autre partie, celle qui avait le dessus, lui hurla qu'elle avait loupé le coche et ça ne lui plaisait absolument pas. "Bah... il est venu... il a pris le colis... il nous a remercié... et voilà". Jilly semblait un peu surprise. La mâchoire serrée, Lyssa se releva brutalement et sortit de la cuisine. "Quoi ? Fallait pas ?". Lyssa ne répondit même pas. Elle traversa le salon, se prit une fois de plus les pieds dans les vêtements de Bailey et hurla à nouveau. "BAILEY TES FRINGUES, PUTAIN !". Elle manqua de se rétamer sur la moquette et claqua la porte de sa chambre. C'était quand même pas de chance. Elle attrapa ses vêtements, enfila un jean, un chemisier, attacha ses cheveux rapidement et sortit de la pièce croisant Bailey sur son chemin. "Tu devrais baiser un coup, ça te ferait du bien !". Serrant encore plus sa mâchoire, Lyssa attrapa son sac à main, y balança son téléphone portable et s'apprêta à sortir. "Pense à récupérer le numéro du beau garçon du café !". Elle leva les yeux au ciel, attrapant ses clefs. Ses sœurs étaient vraiment insupportables lorsqu'elles le voulaient. Jamais elle n'aurait dû leur raconter cette histoire. Ce beau mec, venant tous les jours au café où elle travaillait pour prendre un de ces muffins dont elle seule avait le secret. Ça faisait une semaine que ça durait. Une semaine où ils s'échangeaient juste quelques regards... Rien de plus. "Moi et ma vie sexuelle, on vous emmerde !", hurla-t-elle avant de claquer la porte. Elle descendit les quelques marches de l'escalier en bois et tomba sur monsieur et madame Gilbert... Ses voisins du deuxième. Ils la fixèrent quelques instants, visiblement choqués, avant qu'elle ne trace sa route, rouge de honte.